A chacun ses fantômes.

Moi, je suis poursuivi par « une moto à 100 mètres de l’hôtel ».

Solène est hantée par « le Zéro en final du championnat de France national 2010 ».

Pierrick redoute  « le bronze alors qu’il voulait l’or ».

Mon fantôme ne voit pas le jour. J’ai triché en mettant une fausse adresse sur le GPS.

Le pauvre, je l’imagine très bien en train de m’attendre encore au coin de la rue machin-truc.

Pour Solène, le combat est plus difficile. Son fantôme est plus sournois.

Il est aidé par une ambiance un peu glaciale et un concours avec 19 filles.

L’échauffement est …bof.

Mon téléphone vibre. Ouai, j’ai un texto.

C’est Lavinia qui me demande si elle doit prendre la nouvelle course d’élan travaillée mardi dernier.

Elle n’est pas à Bordeaux.  Elle est à Eaubonne tout comme Valentine et Vincent pour participer au premier tour de l’équip’athlé sous les conseils de Fabrice.

Ma réponse est claire : « non, mais si tu veux tu peux. Mais je préfère non. »

Solène décide de débuter avec une perche plus souple que la semaine passée.

La barre est enfin à 3m50. Le concours a commencé il y a une bonne heure.

Un vent froid vient me chatouiller la nuque.

Serait-ce le fantôme de Solène ?

Elle s’élance. Le passage est bon. Le rythme…y’en a pas.

Elle quitte le sol.

Elle se retrouve sur le terrain favori du Zéro c'est-à-dire sur le chemin de la barre.

Ouf, elle passe. Le petit vent frais n’est plus là.

Solène n’est pas encore dans la compétition. Comme beaucoup d’autres filles, elle se demande pourquoi elle est venue.

« Mais qu’allaient –elles donc faire dans cette galère ? »

Je lui lance que nous sommes simplement venus nous amuser.

 Mais ce n’est pas le genre de Solène. Elle fait l’impasse à 3m60.

Après une longue attente, elle passe 3m70 au premier essai.

Le fantôme du fantôme vient de prendre une claque à son tour.

Solène court mieux pour 3m80 mais ne passera pas.

Elle termine 4^ème du concours général, mais 3^ème du championnat national car l’espoir qui gagne était au championnat Elite.

Je reçois un texto.

Lavinia m’informe qu’elle vient de faire 3m10 et donc de battre son record.

Elle m’informe aussi que Valentine a égalé le sien avec  2m80 et que Vincent  la battu de 20 cm pour le porter à 3m00.

Je suis content. Je vais pouvoir passer une bonne soirée.

Je réponds : « bravo les jeunes. Solène est 3^ème avec 3m70. »

La réponse à ma réponse ne se fait pas attendre : « bravo à la vieille. »

Solène est super contente en apprenant les résultats des jeunes.

Je pense qu’elle règlera ses comptes avec Lavinia mardi soir.

De retour à l’hôtel, nous prenons un chocolat chaud en compagnie de mon ami coach Michel.

Je me couche de bonne heure le dimanche matin comme pour profiter au maximum de cette belle journée.

A peine le temps de fermer le deuxième œil qu’il faut déjà  ouvrir les deux.

La douche un peu fraîche fait son travail.

Je prends le chemin de la salle pour assister Pierrick car son entraineur de l’Insep n’est pas présent.

Pierrick tarde à se mettre en jambes.

Il met un peu les épaules en retrait, même sur une simple course sans perche.

Je décide alors d’axer mes conseils sur les intentions et un seul point technique.

Notre bûcheron va mieux en fin d’échauffement.

Je lui dis qu’il se réveillera encore dans le concours.

Après être rentré dans le concours avec un beau 4m90, il me demande s’il doit faire 5 m 00.

Jean-Jacques : « tu es venu pour faire des barres ou monter sur le podium ? »

Pierrick : « Monter sur le podium. »

Jean-Jacques : « Alors…fais 10. »

Pierrick a attendu très longtemps pour se retrouver face à 5m10.

Il y a eu près de 20 sauts à 4m90 et 25 pour 5m00 ou 5m05.

Je trouve le temps long aussi alors j’écris et je crie à Pierrick de suivre le déroulement du concours car il discute tranquillement en bout de piste.

Il lui faudra deux essais pour franchir 5m10.

Le saut s’installe. C’est mieux.

Le concours gagne en intensité. Le public peu nombreux ne s’y trompe pas.

Deux perchistes tentent 5m15 sans succès.

Ils ne sont plus que 4 à 5m20.

Samuel  nous plante un superbe premier essai et poursuit ainsi un concours sans faute.

Pierrick et les deux Alexandre montrent moins de réussite.

Alexandre F. ne passe pas à sa deuxième tentative contrairement à l’autre et notre héro.

Alexandre F. demande une barre à 5m25 pour son troisième essai comme l’autorise le règlement.

Mais il ne passe pas.

Pierrick est en bout de piste. S’il passe, il prend la tête du concours et force les 2 autres candidats, à la première marche du podium, au succès.

Aie, essai.

Ce n’est pas grave, un petit conseil et le voilà reparti.

Yesssssssssssssssssss. Il passe.

Je lui demande de faire l’impasse pour mettre la pression aux autres mais surtout pour permettre à sa carcasse de récupérer.

La barre tremble du haut de ses 5m30.

Samuel et Alexandre ont la ferme intention de battre leur record pour détrôner  le petit Pierrick.

Alors que Samuel quittera le concours, Alexandre réalise un méga deuxième essai pour reprendre la médaille d’or au bûcheron.

C’était vraiment de la belle perche.

Ma stratégie a échoué. Pierrick se retrouve à son tour au pied du mur, un mur de 5m35 de haut.

Alexandre est le premier à tenter. Il échoue de peu.

Pierrick est concentré. Il doit juste battre son record et exploser sa meilleure perf de la saison pour reprendre la tête du concours.

J’aurais aimé que vous soyez là pour voir Pierrick réchauffer à lui seul ce vélodrome de Bordeaux.

Vous comprenez j’espère que j’essaie de trouver la meilleure formule pour vous traduire ce que j’ai pu ressentir quand je l’ai vu passer au premier essai.

Je me suis permis de penser que j’y étais pour quelque chose.

Alexandre nous refait trembler avec ses deux beaux essais à 5m40.

Après un « retour-piste » au troisième essai à 5m45, Pierrick a montré qu’il était bien l’homme de la journée en retournant tranquillement en bout de piste pour s’élancer un 5 secondes de la fin du temps réglementaire et tenter ce qui sera son dernier saut de la journée.

 Voilà, il ne nous restait plus qu’a rentrer chez nous.

Après avoir déposé mon premier colis dans les Yvelines et le second sur Paris, je suis arrivé chez moi vers minuit.

A minuit et une minute, je répondais aux nombreux messages reçus dans la journée.

Puis j’ai éteint mon ordinateur et mis un point final à ce joli week-end anniversaire.

Merci.